Ni ceci ni cela et pourtant

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Ni ceci, ni cela, et pourtant

Dans la Voie de la Siddha, version laïque, l’être humain est dit être « neti-neti » c’est-à-dire non pas « rien, rien », comme le traduisent certains, d’un point de vue littéral, mais plutôt, « ni ceci, ni cela ». Toutefois, et à l’usage de qui il est lentement devenu, il est persuadé d’être ceci ou bien cela, selon les critères mentaux de sa programmation intime. Dès lors, même s’il trouve un jour « mieux » ou « plus » que ce qu’il croit être, il ne peut pas facilement changer, car il a peur de perdre la seule chose qu’il connaît, à laquelle il est habitué, pour autre chose d’inconnu et qui n’est « expérimenté » que ponctuellement et en esprit. Penser à ce que l’on pourrait faire ou être par ailleurs, ne donne pas nécessairement le pouvoir de le faire ou de l’être.

Tout le monde désire changer sa vie ou au moins l’améliorer, mais rares sont ceux qui ont assez de courage pour expérimenter autre chose que ce qu’ils sont déjà. Du moins, de ce qu’ils croient être déjà, ce qui serait plus exact. Prenez le temps d’observer sans jugement ni passion, ceux qui font du théâtre, qui jouent des rôles, se servent de marionnettes, doublent des voix étrangères en français, etc. Tous ces artifices servent uniquement à une personne à « s’essayer » dans d’autres rôles sans avoir à quitter le leur qu’ils estiment propre. Et qui les sécurise. Car après tout, qu’est-ce qui empêcherait une personne qui n’est pas pleinement heureuse, de changer radicalement de vie ?

Une peur énorme est à la base de cet état d’esprit et ce n’est pas vraiment et comme on le croit, la peur du changement mais la peur de ne plus savoir qui ils sont, ce qui reviendrait, pour eux, à disparaître et à mourir. C’est pour cette raison que les gens, même spirituels, sont plus des théoriciens que des praticiens. Quand ils essayent de changer, ils le tentent « en esprit seulement », rarement « en vérité ». Ils se contentent de collectionner des images mentales d’un avenir meilleur, d’une meilleure version de soi, sans jamais se donner la peine d’en vivre le contenu formel. Quand l’être humain réalise enfin qu’il n’est ni ceci, ni cela (« neti, neti »), alors il devient vraiment libre d’être qui il veut et ce, aussi longtemps qu’il le veut.

C’est cela la véritable liberté de l’être, c’est cela qui fait passer un être du Règne humain au Règne surhumain, voire au Règne Divin. Mais avant cela, il doit faire cesser une peur immense que nous tenterons d’aborder lors d’un prochain article.

 

Serge Baccino