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Le plus que parfait de l’éternel présent
Il est dit que nous devons nous concentrer sur le « Ici et maintenant. » Mais nous ignorons en fait pourquoi ni même comment nous y prendre. Raison pour laquelle nous ne réussissons guère à vivre selon ce précepte ésotérique. Ne pas comprendre complètement une chose nous empêche de la vivre complètement. Vécu intelligent et savoir vont toujours de pair. Les gens hésitent à apprendre, car pour eux, le savoir ne peut être que théorique, voire livresque.
Ce qui est follement amusant, surtout quand on pense aux longues années d’études, conduites par certains, à propos de matières dont ils ne se serviront jamais ! Hélas, sans connaissance préalable, impossible d’appliquer ce que l’on ignore encore ! Ce n’est pas la connaissance, le problème mais bien le fait de l’appliquer ensuite ou non. L’idéal étant évidemment d’alterner entre étude et mise en pratique de ce qui est déjà appris. En fait, si trop de temps passe entre l’étude et la mise en pratique, il y a fort à parier qu’ensuite, nous ne trouvions pas l’intérêt d’appliquer une connaissance jugée disons « dépassée. »
Il est également question du « pouvoir du moment présent. » Mais de quel pouvoir parle-t-on ici ? Est-ce une chose désagréable qui cesse grâce à ce supposé pouvoir ou bien quelque chose d’agréable qui commence grâce à lui ? Et d’abord, même si nous comprenons le sens de la demande, pourquoi devrions-nous à tout prix nous concentrer sur le moment présent ? Qu’a-t-il de plus ou de moins que les autres temps, à savoir le passé et le futur ?
Pour commencer à comprendre de quoi il retourne exactement, il est bon de définir, une fois pour toutes, ce qu’est le temps. Qu’est-ce que le temps ? Comment ou pourquoi devons-nous en tenir compte ? Présentons déjà quelque chose ressemblant à une loi du fonctionnement de l’esprit capable d’expliquer ce qu’est le temps, du moins pour les ésotéristes les mieux initiés. Imaginons que vous deviez aller faire vos courses dans un supermarché. Vous avez votre liste sous les yeux et décidez de commencer par les plats qui feront office d’entrées, puis vous passerez à ce qui consistera en les plats de résistance et vous terminerez par les desserts.
Dans cet exemple, il y a fort à parier que vous n’allez pas vous jeter sur les premières denrées qui vous passent sous le nez : vous allez très certainement prendre le temps de lire les étiquettes afin de connaître la composition de chaque article et, évidemment, vous allez comparer les prix. Disons que vous allez passer en revue et en tout, six articles faisant office d’entrées, six autres concernant les plats de résistance et vous hésiterez seulement entre trois ou quatre desserts différents.
Tout cela va vous réclamer du temps, n’est-ce pas ? Et dans notre exemple, nous pouvons comprendre que ce fameux temps consistera en une sorte de déroulé de votre attention mentale, qui passera d’un article à un autre, afin d’en connaître le prix et la composition. On va simplifier et partir de la prémisse que vous accorderez deux minutes pleines pour chaque article passé en revue. Ce qui fait et par exemple, six fois deux minutes pour les entrées, six fois deux minutes pour les plats de résistance et disons quatre fois deux minutes pour les desserts.
Cette attention mentale allouée à chacun des articles et le fait que cette même attention va passer d’un objet (article) à un autre, vont faire en sorte que votre conscience va littéralement « se dérouler », en passant d’un objet d’attention mentale à un autre. Selon un petit calcul pour notre exemple, nous dirons que vos courses vont durer environ un peu plus d’une demi-heure, soit 32 minutes. Puis vous passerez à la caisse.
Et là, vous allez assister à une autre création de temps qui passe. Vous pourrez alors constater que la caissière passe chaque article acheté au-dessus d’un appareil capable de lire le code-barres de l’article. Ce mouvement et le fait que l’attention de la caissière soit concentrée sur ce qu’elle fait, vont produire du temps. Nous voici donc armés d’une solide loi du fonctionnement de l’esprit concernant « le temps qui passe. »
Cette loi pourrait s’énoncer ainsi : « Le temps est le déroulement de la conscience qui passe d’un objet d’attention à un autre, selon un rythme et une durée pouvant varier ou être égaux. » Vous remarquerez que nous avons associé le rythme et la durée au déroulement de la conscience. En effet, rien ne vous interdit, lorsque vous passez en revue plusieurs éléments ou sujets d’attention mentale, de prodiguer à tel objet plus d’attention qu’aux autres ou inversement.
Que pouvons-nous découvrir d’autre grâce à cette loi spirituelle ? Par exemple, nous comprenons que pour que notre attention mentale soit réquisitionnée puis plus ou moins focalisée (ou concentrée), il faut des objets sur lesquels la conscience de veille puisse s’arrêter, sur un rythme et pour une durée pouvant varier. Sans objet d’attention mentale, point de concentration. Sans concentration, point de processus mentaux !
En effet, pour qu’il y ait pensé, il faut qu’il y ait polarisation de l’attention mentale sur un quelconque objet des sens. Ce peut être quelque chose de vu, d’entendu, de touché, de senti ou de goûté. Ainsi, sans l’intervention des sens et sans quelque chose pour les faire réagir, la conscience repose en elle-même, ne se déroule pas et ne produit donc aucune pensée.
Les anciens Siddha affirmaient que c’est la conscience (Chitti) qui se transforme en pensées (Chitta) lorsqu’elle se met en mouvement. Et elle se met en mouvement seulement lorsqu’elle est concentrée sur un point focal d’attention mentale puis doit s’en extraire pour aller se concentrer sur un autre objet des sens. De là à dire que la Conscience c’est quand l’esprit ne bouge pas, il n’y avait qu’un pas, que tous les ésotéristes du monde se sont empressés de franchir.
Bien sûr, ce que l’on nomme l’exposé de la raison, à savoir notre propre capacité mentale à appréhender les choses de l’esprit, n’est pas forcément l’unique exposé de la plus pure vérité ! Mais il n’est pas nécessaire de connaître toute l’Actualité Cosmique pour comprendre une large partie du fonctionnement du Cosmos. Il est dit que « Tout est en Tout » et que « Ce qui se produit en infiniment petit, se produit également en infiniment grand. » Ou plus communément : « Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas… »
Il est donc inutile de tout savoir : il suffit de comprendre les lois spirituelles en rapport avec la vie terrestre incarnée, pour comprendre les lois de la Grande Vie spirituelle et hors de la chair (ou supposée telle.) Si l’on s’inspire de ce qui a déjà été mentionné plus haut, on comprend très vite que c’est pour ainsi dire la pensée qui engendre le temps. Lorsque notre conscience n’a aucun « point d’appui » à se mettre sous la dent, à savoir lorsqu’elle n’a aucun repère objectif à sa disposition, elle est pour ainsi dire coupée de ce que l’on nomme « le spatiotemporel. »
Et sans repères psychologiques pouvant offrir un support à la conscience sous la forme d’une attention mentale polarisée, il ne peut pas y avoir de processus mentaux. D’ailleurs, il est facile de contrôler qu’il est impossible de penser sans un sujet à partir duquel peuvent s’élaborer nos processus mentaux. Autrement dit, on ne peut pas « penser à rien », contrairement à ce que prétendent certains. Rien ne se pense pas. Lorsqu’une personne ne pense pas, elle est seulement consciente. Elle ne se préoccupe pas de savoir ce qu’elle est et si ce qu’elle est, est correct ou sujet à critique.
Mais si cette personne voit son attention mentale attirée puis réquisitionnée par les singeries mentales d’un tiers, alors cette personne va très certainement se remettre à penser. Et dès que la pensée apparaît, le temps fait également son apparition. Très bien, mais quel rapport avec notre sujet principal ? Le rapport est direct et d’ailleurs inséparable de tout ce qui vient d’être proposé ici.
Imaginons que vous soyez chez vous, assis dans votre canapé, à ne penser à rien et donc, à n’avoir aucune conscience du temps qui passe. Tout à coup le téléphone sonne et vous sursautez, ce qui vous fait sortir de cette sorte de léthargie mentale. C’est votre amie Léon qui vous informe qu’il vous attend en bas de chez lui depuis près d’un quart d’heure. Et là, vous réalisez que vous aviez complètement oublié votre rendez-vous ! Vous êtes déjà bien en retard, même !
Comment savez-vous que vous êtes en retard ?
Très simple : ce sont les mémoires qui vous le font savoir ! Votre conscience a fait une rapide incursion dans le passé et a compris qu’elle avait promis à Léon d’être devant chez lui à telle heure précise. Puis votre conscience va faire un autre bond, cette fois-ci dans le futur. Un futur probable, bien évidemment ! Et dans ce futur-là, il est plus que probable que Léon vous fasse la gueule une bonne partie de la journée. Pour vous apprendre à l’oublier, vous voyez ? Bien.
Qu’avons-nous ici ? Tout d’abord, vous êtes dans une sorte d’état de conscience sans pensées et perdez toute notion de temps. Léon en est la preuve même ! D’ailleurs, nous serions assez tentés d’ajouter que durant cette période sans pensées, le temps n’existait pas pour vous. En fait, il n’existait pas encore parce que vous ne l’aviez pas encore créé ! Mais tout à coup, Léon fait vibrer le téléphone et vous voici informé du temps qui a passé. Qui est passé… Sans vous, à votre insu ! Dès lors, vous prenez conscience de votre oubli et dans la foulée, vous changez même de temps, passant du passé au futur, en imaginant les réactions intempestives de Léon.
Vous voici revenu au sein du temps linéaire, de ce « temps » qui consiste non pas à être seulement conscient, mais plutôt conscient de quelque chose. De quelque chose d’autre que Soi, en fait. Lorsque la conscience est inerte, qu’elle repose sur elle-même et ne passe plus ou pas d’un objet d’attention mentale à un autre, elle n’est que pure conscience d’être. Mais lorsque cette même conscience se produit au travers de différents états d’esprit, de nombreuses pensées, alors elle n’est plus la conscience : elle devient l’esprit.
Comme vous le savez déjà, l’esprit est ce qui sert à penser. À penser et à produire toutes choses, puisque tout, absolument tout, est fait d’esprit ! La Conscience est donc elle aussi de l’esprit, mais un esprit informel, non encore associé à des formes mentales issues de l’observation et de l’idéation. Et quand on sait que la personnalité et le caractère d’un être humain se rapportent exclusivement à la quantité et à la qualité de ses processus mentaux, de ce qu’il pense et des émotions que ces pensées engendrent, on commence à comprendre certaines choses.
Par exemple que la somme ou l’entièreté de la souffrance humaine est causée par l’esprit formel, à savoir par des formes mentales et donc, des pensées. Allons plus loin encore : si la pensée, issue de la conscience qui se déroule d’un objet d’attention à un autre, engendre le temps qui passe, alors nous pouvons en déduire que nous ne souffrons qu’aussi longtemps que nous persistons à penser au lieu d’être seulement conscient. Prenons un exemple précis afin de voir exactement comment et pourquoi naissent les pensées.
Vous observez une rue passante depuis la fenêtre du premier étage de votre appartement. Votre attention se porte tour à tour sur une vieille dame qui avance courbée en deux, puis sur une très jolie jeune femme qui a eu la bonne idée de porter un décolleté profond. Dans le premier cas, la vieille dame, le fait de vous polariser quelques secondes seulement sur elle vous fait penser que la vie est parfois injuste, qu’elle passe trop vite et qu’elle apporte à chacun son lot de souffrance.
Puis, quand votre attention mentale réussit à se « décoller » de la vieille dame souffreteuse pour venir se river avec joie dans les profondeurs de la généreuse poitrine de la jeune femme, vous ressentez de la joie à l’idée d’être encore jeune et en bonne santé et susceptible d’embellir la journée de ladite demoiselle, pour peu qu’elle vous en laisse la chance ou le droit. Ces deux exemples suffisent amplement pour constater que nos pensées apparaissent puis disparaissent pour laisser la place à d’autres pensées, ceci au rythme créé par le changement de focale mentale.
Si nous pensons souvent (rythme) et longtemps (durée) à quelque chose qui éveille en nous des émotions peu réjouissantes, nous pouvons ressentir, à la longue, une très nette baisse de vitalité. Notre vitalité dépend, en grande partie, du contenu formel ou de la nature de nos processus mentaux. À l’inverse, si nous avons l’occasion de nous concentrer souvent et assez longtemps sur des idées agréables, nous instaurons, en notre mental, des fréquences vibratoires hautes qui, à la longue, nous offrent le sentiment que nous sommes immortels, que tout est possible et que la jeunesse n’est en fait qu’à simple état d’esprit.
Dès lors, nous commençons à mieux comprendre cette idée de l’instant présent. Au sein du Maintenant, il n’y a pas de pensées et donc, il n’y a pas de temps, puisque aucun mouvement d’un point focal d’attention à un autre et ainsi de suite. Seul le déroulement de la conscience engendre ce sentiment de temps qui passe et même, celui de l’espace, autour de nous. Nous savons qu’il nous faudra un certain temps pour nous déplacer d’un point à un autre et donc, nous prenons conscience de l’espace en même temps que du temps, les deux étant étroitement liés.
Observez vos pensées lorsqu’elles se proposent à vous. Viennent-elles du passé, c’est-à-dire des Mémoires ? Dans ce cas, le passé en tant que tel n’a aucune existence. Sont-elles en rapport avec quelque évènement probable futur ? Alors si ce n’est que probable, car non encore manifesté, il s’agit là encore plus d’illusion que de réalité. En somme, la seule chose qui soit certaine, le seul « temps » hors du temps, c’est le présent. Présentement, il ne se passe rien, ni en vous ni hors de vous et rien n’attire puis ne maintient votre attention mentale. Vous êtes tranquille et aucune souffrance mentale ne peut vous atteindre si vous ne lui donnez pas l’opportunité d’exister pour vous et en vous, c’est-à-dire en votre conscience mentale.
Serge Baccino