Connaissance de soi, connaissance de tous

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Connaissance de soi, connaissance de tous

 

Il est dit « Connais-toi toi-même », sous-entendu « et tu connaîtras l’univers et les dieux ». C’est ce qui, selon Platon, était inscrit sur le fronton du temple de Delphes. (Gnôthi Seautôn, ou en grec ancien Γνῶθι σεαυτόν.) Très bien, à notre époque dans laquelle l’intellect est roi, il est aisé de comprendre le sens de cette phrase étonnante, voire d’en capter en partie la profondeur purement philosophique. En effet, puisque nous sommes tous des humains, sans doute que se connaître soi aide grandement à connaître autrui. Mais ce n’est là qu’une simple pirouette mentale qui s’appuie sur les deux formes principales de raisonnement : le déductif et l’inductif. Ce n’est en rien une explication, même théorique, qui soit digne de ce nom. Du moins pour un psy éso.

 

Par contre, si on part de la prémisse que toutes les formes de processus mentaux sont incluses au sein de l’Inconscient Collectif et que tous les êtres humains y sont reliés dès l’instant où ils se mettent à réfléchir ou à mentaliser, alors on peut dire que celui qui se connaît, connaît forcément tout le monde, puisque tout le monde et chacun puise dans cette même Ressource Commune pour élaborer les divers états d’esprit connus et référencés.

 

Cela revient à dire que celui qui boit l’eau d’un bassin qui sert à étancher la soif de tout un village, connaît du même coup l’eau qui se trouve absorbée en chacun de ces habitants de ce même village. Ou encore et pour user d’une comparaison moderne, celui qui connaît la disquette qui a servi à programmer mille robots différents mais recevant un même programme commun, connaît tous les robots et peu deviner sans peine leurs différents comportements.

 

En fait, la chose est plus complexe à expliquer qu’à comprendre en une fraction de seconde, telle une illumination subite qui éclaire le mental de l’homme à jamais. Du moins à ce propos. Reste à définir comment, à partir d’une même source de pensées, les hommes réussissent à être, du moins en apparence, si différents ! Mais la chose reste accessible si l’on s’amuse à comparer chaque être humain à un verre teinté aux couleurs toutes différentes. Ainsi, une même eau incolore deviendra « verte » dans ce verre dont la teinte est le vert, et dans celui-ci qui est bleu, l’eau prendra, du moins en apparence, cette même teinte bleue, etc.

 

Pourtant, l’eau demeure de l’eau et ne possède aucune des couleurs qu’elle semble adopter ici (tel humain) ou là (tel autre humain.) De même, à partir d’un seul et unique Inconscient Collectif, rempli de toutes les formes de pensées possibles et imaginables, alimentées et entretenues depuis des millénaires, nous voici en présence de personnes dissemblables qui toutes, réagissent plus ou moins différemment mais toujours à leur manière, aux différents contenus de cette Source commune.

 

Reste à savoir pourquoi certains d’entre nous paraissent qui « différent », qui « unique. » Si l’on excepte ceux qui font mine de l’être mais ne diffèrent en rien de leurs semblables, certains sont en effet différents. Et cela est compréhensible, du fait que tandis que la plupart s’alimentent à une même portion limitée de cet Inconscient Collectif (I.C.), d’autres choisissent de ne plus s’alimenter qu’à des secteurs oubliés, méconnus voire carrément boudés, du moins à notre époque. Et c’est cela seul qui les rend différents.

 

Quand à ceux qui paraissent uniques, tant leur différence est flagrante, pour ne pas dire gênante voire « encombrante », disons qu’ils s’abreuvent peut-être à d’autres « citernes mentales » et étanchent leur soif d’être, faute d’exister, à des Eaux Profondes qui ne sont pas encore « oubliées », puisqu’elles ne sont pas encore connues et encore moins référencées.

 

Serge Baccino