Le besoin de reconnaissance

Getting your Trinity Audio player ready...

Le besoin de reconnaissance

Le besoin de reconnaissance est non seulement naturel et sain, mais indispensable dans nos sociétés modernes, afin que chacun sache ce qu’est l’autre et comment tenter d’interagir avec lui. En effet, si vous n’obtenez aucune reconnaissance de vos pairs, vous ne saurez jamais comment vous intégrer ou même vous adapter à eux et eux ne le pourront pas non plus. Connaître la valeur de sa propre image sociale (et non sa valeur personnelle) permet cette interaction socio-culturelle et la conduit à un très haut niveau d’efficacité.

Dès la prime enfance, soit avant l’âge de sept ans, les parents font tout pour que leurs enfants les reconnaissent eux, en tant qu’adultes formés pour les diriger. Ce sont donc les parents qui exigent et reçoivent plus ou moins de reconnaissance de la part de leurs enfants. Même si cette seule idée est capable d’en perturber plus d’un, elle ne représente pas moins l’expression de la plus simple réalité. Mais ceci n’est pas un problème, cela dans la mesure où la Nature a prévu ce que l’on nomme  » l’âge ingrat. »

Dès cette période, l’enfant tente d’obtenir de la reconnaissance personnelle et s’il n’y parvient pas, il aura pour saine réaction de rejeter toute forme d’autorité consistant en une forme quelconque de reconnaissance du pouvoir d’autrui. Reconnaissance (envers les parents, adultes et professeurs, etc.,) qui a été, selon lui, largement manifestée et ce, durant des années.

Les deux mots  » âge ingrat  » en disent long sur les attentes nécessairement frustrées de la plupart des parents, lorsque leurs gosses atteignent cet  » âge fatidique « . Fatidique pour le pouvoir temporel qu’ils ont sur leur progéniture et donc, pour la reconnaissance de ce même pouvoir ou ascendant. Une réaction assez symptomatique de ce besoin viscéral de dominer, contrôler, régenter, de peur de perdre ce qui, de toute manière, n’a jamais était acquit et ne le sera jamais. A moins de considérer les enfants comme des objets que l’on puisse posséder et modeler à notre guise ? Que chacun en juge librement.

Cette volonté que perdure l’ascendant familial au-delà des limites usuelles de l’adolescence voire de la majorité légale, produit une double carence. D’abord chez l’enfant, qui ne sait alors plus qui il est et ce qu’il vaut vraiment, chez les parents ensuite, qui obtiennent, au mieux, une reconnaissance immature : celle d’un enfant. Alors qu’ils avaient surtout besoin de celle de leurs propres parents. Grands-parents qui, à leur époque, étaient tout aussi incapables de permettre à leurs enfants de prendre conscience de la valeur intime qui est la leur, que ne le sont, aujourd’hui, les nouveaux parents, mais toujours maintenus dans cette attente enfantine d’une reconnaissance qui ne viendra sans doute jamais.

En fait, il est bon que les parents soient exigeants envers leurs enfants et ce, jusqu’aux alentours de la quatorzième année. Cela produira, en son temps, une réaction saine et naturelle : celle d’un ado décidé à ne plus se laisser mener par le bout du nez, comme un petit enfant. En somme, la manière d’élever un enfant permettra, ou non, à cette fameuse crise existentielle de l’adolescence, de se manifester ou pas. Si elle se manifeste et que les parents y répondent avec intelligence et logique, l’enfant bénéficiera, par la suite, d’un caractère bien trempé mais qui aura connu certaines nécessitées de la vie. Sans être un politicien de premier ordre, il sera capable de souplesse mentale, sachant qu’il ne lui sera pas toujours nécessaire de demeurer courbé face aux autres.

Les autres, ceux n’ayant pas eu le privilège de bénéficier d’une forme d’éducation aussi intelligente qu’adaptée à l’enfant, se reconnaîtront aisément au fait qu’ils réagiront toujours de la même manière face à une tentative de  » prise de pouvoir  » sur leur personne morale. Généralement en se cabrant, se fermant ou même, en devenant agressif, au moins en paroles. Seul celui qui n’a aucune confiance en sa capacité à résister à l’adversité, jugera utile de réagir avec une fougue exagérée, supposée masquer sa frayeur à la seule idée d’être considéré comme un faible (ou assimilé.)

En vérité, ceux qui tentent de cacher hurlent très fort leur peur à la face des autres ! De nos jours, nul besoin d’avoir étudié une douzaine d’années la psychologie, pour savoir que ce sont ceux qui crient les plus forts qui sont les plus peureux de vivre.

 

Serge Baccino