Puisque tout est double

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Puisque Tout est double…

(Extraits)

 

Puisque « Tout est double » et de ce fait, je ne puis être « une » chose et en suis nécessairement deux. En même temps. Moi et tout le reste : Principe de Polarité, ici la Répulsion : Je sais que Je Suis grâce à l’altérité, à tout ce que je ne suis pas ou ne crois pas être, ce qui revient au même. Mais si je participe de deux polarités, laquelle suis-je ? Suis-je l’un, l’autre, les deux, le résultat de l’union de ces deux ou encore autre chose ? Un Maître du passé disait : « Je suis Le Courant, je suis Le Résultat, je suis dans l’énergie Magnétique qui circule d’un pôle à un autre de mon propre univers Mental. »

Je Suis est un Centre dont la périphérie est de partout. Le centre c’est Moi et la périphérie, c’est Tout Le Reste ainsi que les autres. Du coup, me voici encerclé par le non-moi et je ressens cette état de fait comme un danger. Il me faut donc agir pour faire cesser la peur, c’est-à-dire soit nier l’altérité (haine, jalousie), soit me l’approprier (peur, manipulation, guerre, instinct de possession.) Le problème est que tous les autres centres virtuels, les autres Moi, les Eux,  vivent et ressentent la même chose ! Voilà qui est fâcheux ! Mais pourquoi suis-je ce Mouvement en Avant ? Pourrais-je être ou devenir le pôle A (Moi) ? Pourrais-je devenir le pôle B (l’univers, l’infini altérité) ? Ou bien, comme déjà formulé, ne suis-je que ce courant électromagnétique qui circule d’un pôle à un autre ? Si c’est bien le cas, alors le premier pôle ou « Moi » consiste en mon passé et l’autre pôle, l’univers/altérité est mon futur.

 

Je Suis est un Mouvement qui va de l’un à l’autre, mais à aucun moment, je ne suis vraiment Moi, du moins définitivement, telle une chose qui puisse durer et être ainsi localisée et quantifiée. Quand je suis le « Moi », que je m’attache à ce que je m’imagine être parce que j’aime ce que je suis et voudrais le rester, je freine mon Mouvement, ma dynamique mentale, je perds de l’énergie animique (de l’âme) issue de ce même Mouvement permanent. Et dès lors, je souffre ! Si j’essaye de devenir mon futur, le Tout, l’univers, je n’y parviens pas, pourquoi ? Parce que si j’y parviens, je disparais, c’est la véritable mort (perte d’identité, de ce sentiment d’être distinct et séparé du Tout.) Il est donc heureux pour nous tous que la chose soit impossible, éternellement, car à chaque instant.

Mais à quel moment suis-je « Moi », finalement, si « Ce Que Je Suis » est un Mouvement en Avant, une avancée permanente, sans fin ni limite ? Réponse : je ne suis jamais « Moi », je ne suis jamais rien : Je suis cette sensation de Mouvement, cette perception de quelque chose à laquelle je m’identifie mais qui varie sans cesse ou du moins, devrait le faire. En fait, « Je Suis » n’existe pas. Je Suis devrait plutôt se nommer « Je serai », car c’est « plus tard » que le Devenir Permanent pourrait éventuellement être.

 

Mais serai-je un jour ? La réponse est NON ! Si j’arrivais un jour à exister en tant que quelque chose, je cesserais alors d’être et d’en avoir la sensation, puisque le Mouvement prendrait fin en arrivant à son terme, et comme Je Suis est cette SENSATION de Mouvement, alors Je Suis cesserait d’être, définitivement, car ce qui existe doit exister pour toujours, invariablement, sans que lui soit ajouter ou retranché la moindre parcelle. Je Suis (Ayam ou Aham) est donc en construction permanente, jamais existant, toujours tendant à être par le Devenir incessant, qui lui donne la sensation d’exister sans jamais exister vraiment. Sensation issue de ce Mouvement Permanent, de cette FRICTION entre un point focal de conscience et « Tout-Le-Reste » qui est censé délimiter un « Moi » hypothétique qui n’a l’occasion d’être que du fait de l’altérité, de la comparaison, de l’illusion de séparation.

 

Lorsque l’homme comprend qu’il est aussi l’univers vers lequel il semble aller, il ne conçoit plus l’altérité comme étant une chose à « gagner » ou à « perdre », puisqu’il comprend qu’il est déjà ce vers quoi il s’avance, qu’il est Toutes Choses mais n’en a pas encore fait l’expérience linéaire. Et pourtant, il comprends également qu’il n’est aucune de ces choses mais seulement une sensation de devenir puis de quitter toutes les choses, les unes après les autres.

Ce qu’il conçoit comme étant son « Moi » provisoire, devient son passé, le « déjà acquit » et donc, le « déjà connu. » Pour ne pas avoir à revivre toujours les mêmes choses, il accepte son présent qui est un « passage en revue » de ce passé.

Ne pouvant pas le changer, il cesse de s’en émouvoir et comprend que sa réaction à ce qui existe déjà, car déjà passé, servira à construire un nouveau passé qui formera un futur présent. Il sait que si le passé est irrémédiable (son présent actuel formé du passé lui étant présenté), son futur reste encore à écrire.

 

Nous sommes forcément tout notre passé, sa somme. Le nier ou en refuser les détails ou le contenu, revient à nier que ce qui est dans notre conscience y soit pour de bon. C’est idiot et inutile, voire dangereux, comme état d’esprit. Mais nous ne sommes pas encore devenu (en l’intégrant/acceptant) tout notre futur ! C’est donc sur lui que nous pouvons obtenir un contrôle total, mais auparavant, nous devons CESSER de nier les faits (le passé mémorisé), car en le faisant, nous aggravons ces faits. En nous opposant à ce qui se trouve déjà en nous, nous employons notre force vitale pour essayer de nier l’évidence. Cette même force nous revient (effet boomerang, le vrai !) et nous souffrons !

Nous devons non pas « tout accepter », mais accueillir notre présent comme étant « ce qui est déjà passé », sans chercher à en changer la moindre parcelle (« ne pas toucher aux énergies ») Mais si nous accueillons le passé, nous libérons l’énergie pour commencer à écrire notre futur qui deviendra, lui aussi, un présent différent. Nous changeons donc nos « futurs présents », si l’on peut dire.

 

Serge Baccino

(Extrait des Cours de La Voie de la Siddha – Version Laïque.)