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Les sectes en question

Citation :

 

« La secte du Mandarom a obtenu jeudi gain de cause devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), qui a condamné la France pour des redressements fiscaux portant, selon elle, atteinte à la liberté de pensée, de conscience et de religion.

Les juges de Strasbourg ont appliqué à deux associations liées au Mandarom et à une autre secte la même logique que celle dont ils avaient déjà fait bénéficier dans un autre arrêt, en 2011, la branche française des Témoins de Jéhovah. »

Pour lire la suite sur le site originel : http://www.paris-normandie.fr/article/actualites/la-secte-du-mandarom-fait-condamner-la-france-devant-la-cour-des-droits-de-lhomme

 

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Je crois que le problème des sectes et de ses présumées « dérives » vient du manque de rigueur mentale (pour ne pas dire de l’hypocrisie) dont fait montre le gouvernement français et ce, depuis de nombreuses années. Il est clair qu’il ne souhaite pas reconnaître qu’il mélange allègrement les histoires de fric avec la liberté culturelle (ou cultuelle.) En fait, il faudrait faire trois procès, ceci pour être bien certain de respecter aussi bien la législation que les droits citoyens les plus élémentaires.

 

 

 

Le premier procès devrait servir à définir si la France ne profite pas de ses lois édictées pour se remplir les poches sur le dos des autres cultes, voire pour contrôler les croyances du peuple. Les lois fiscales sont une chose, en profiter pour casser les reins aux différents cultes en les mettant dans l’incapacité de rembourser et donc, en la rendant hors la loi, en est une autre.

 

 

 

Le second devrait se résumer à décider, preuve à l’appui, si une secte est nuisible, socialement ou pas. Si elle l’est, le fric ou la liberté d’expression deviennent dès lors des considérations secondaires. De telles sectes doivent absolument être condamnées et leurs dirigeants mis hors d’état de nuire.

 

 

 

Le troisième devrait régler définitivement le problème des libertés de conscience, d’opinion et de croyances. Ou bien nous sommes libres de croyances et de pratiques, ou bien autant nous imposer les religions « en place » et effacer le premier des trois mots, « liberté », de la devise de nos monnaies !

 

 

 

incompetenceTant que les gens mélangeront tout, ce sera la pagaille et il y aura nécessairement des injustices. Mais la question qui se pose est de définir, avec quelque exactitude, si ce mélange découle de l’incapacité de nos dirigeants à se montrer logiques et justes, (incompétence) ou si cela dénote une volonté sous-jacente de parvenir à des fins que je laisse à chacun le soin de définir par lui-même.

Il apparaît comme évident que toutes les « sectes » de France ne sont pas considérées comme « sectes » ! Certains auraient-ils le compas dans l’œil mais avec la pointe qui leur crève les yeux ?

 

 

 

Serge Baccino

Licence Creative Commons
(Note : Sauf pour la citation de début et les images, trouvées sur le Web.      Me dire en cas de droits non respectés et à mon insu.)

La « secte des adversaires des sectes »

Je n’ai pas résisté au plaisir de vous livrer ici des extraits de « lettres ouvertes à la secte des adversaires des sectes » (1997) de l’Historienne et professeur belge Anne Morelli. Il m’a semblé que ces citations se passent de tout commentaires, si ce n’est un « Bravo » pour le courage et la clairvoyance évidente de l’auteure. Mais tout d’abord une courte biographie de ce professeur de critique historique Belge.

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Anne Morelli est une historienne belge et professeur de critique historique appliquée aux médias modernes et d’histoire des Églises chrétiennes contemporaines et de Textes chrétiens contemporains. Elle a participé en tant qu’experte à la Commission d’enquête parlementaire sur les Sectes.

Avec ses élèves en sociologie des religions, elle a étudié près de 90 groupes religieux, habituellement appelés « sectes », ce qui lui a donné matière pour ce court essai qui dénonce le lobby « anti-sectes ». Sa philosophie morale pourrait se résumer ainsi :

 

« Si vous n’aimez pas ça, n’en dégoûtez pas les autres ! »

 

Commençant par poser la question « qu’est-ce qu’une secte ? », Anne Morelli nous entraîne rapidement vers une autre question : « quelle différence y a-t-il entre une secte et une religion ? ».

Pour elle, il n’y a pas d’autre différence que le regard que pose la société et ses médias sur tel ou tel groupuscule, mouvement, Église. Toutes deux procèdent du même phénomène humain, la croyance en une certaine forme d’irrationnel. Dans ces conditions, pourquoi l’Etat belge reconnaît-il et finance-t-il l’Eglise catholique et pas les Témoins de Jéhovah et la Scientologie ? Une question de rapport de force.

 

Anne Morelli met donc en garde contre les risques de toute chasse aux sorcières et nous amène donc à réfléchir. Avec une certaine ironie, elle plaide pour une tolérance religieuse élargie à tous les « fous de Dieu », qu’ils appartiennent aux grandes « multinationales » de la religion ou aux petits groupes indépendants, parmi lesquels il y a peut-être les futures grandes religions de demain. Mais en conclusion, elle revendique le « droit à la critique et à la dérision de toutes les idées, y compris les croyances et pratiques religieuses ».

« Je pense que les sectes ne sont encore en matière de « nocivité » que de pâles amateurs à côté des grandes multinationales des religions, dont les morts sont à comptabiliser par millions. »

 

Lettre ouverte à la secte des adversaires des sectes

Anne Morelli

Editions Labor, (1997 – 93 pages)

 

« Leurs méthodes sont partout semblables : jeter le discrédit sur tous les groupes religieux en dehors des grandes religions classiques et semer à ce sujet la désinformation. La « secte des adversaires des sectes » tenaille donc particulièrement les médias et le monde politique, mais ne néglige pas non plus l’approche du monde de la recherche universitaire. En France, deux associations se partagent ce « marché », correspondant aux deux options fondamentales de la société française : l’une est laïque (C.C.M.M.) et l’autre est catholique (U.N.A.D.F.I.). »

 

« Une autre pratique de désinformation menée par la « secte des adversaires des sectes » est de gonfler les chiffres des adhérents à ces religions minoritaires. Ces chiffres, après douze années d’enquêtes dans ces milieux, je suis plus que jamais incapable de les préciser. En 1981, j’avais – péché de jeunesse – lancé le chiffre de 80.000, mais au fur et à mesure de nos travaux, mes certitudes se sont envolées. Le chiffre, lui, a souvent été repris. Dans chaque groupe religieux, on a tendance à les gonfler (cela donne du poids à la communauté et à ses croyances), mais curieusement, les adversaires des sectes aussi les gonflent, car la pertinence de leur « lutte » (et donc les moyens qu’ils réclament) est évidemment liée au danger potentiel que représente un groupe. »

 

« Lorsqu’un journaliste ne se soumet pas au schéma classique anti-secte, il est aussitôt accusé de complaisance. Ainsi, les auteurs de deux documentaires Arte consacrés aux mormons sont-ils vivement critiqués par « Le Monde » . Ils auraient présenté cette religion avec trop de sympathie… Les auditeurs belges, habitués à entendre l’actualité religieuse commentée par la douce voix de l’abbé Armand Pirard, croient rêver en entendant ces reproches.

Ils imaginent mal qu’à l’occasion, par exemple, de la bénédiction pascale ou d’un voyage du pape, un de ses mièvres commentaires se mette à investiguer à propos des finances du Vatican et de ses opérations douteuses, ou des effets catastrophiques de sa diplomatie pro-Croate. Mais évidemment, il est des monopoles à ne pas traiter sans « complaisance » et des rivaux qu’il est bon d’enfoncer.

On comprend dès lors pourquoi les « sectes » voient rarement avec plaisir débarquer en leurs murs des journalistes, chargés dès le départ de ramener des « informations » croustillantes, sensationnelles et surtout inquiétantes… »

 

« [Si un journaliste décrivait la bénédiction papale dans les termes habituellement utilisés à propos des sectes cela pourrait donner ceci:] Le gourou des catholiques s’est adressé à ses adeptes pour leur rappeler quelques-uns des mythes de leur bric-à-brac de croyances irrationnelles. Il leur a rappelé la nécessité d’embrigader leurs enfants pour faire proliférer le christianisme. Il avait son déguisement et ses colifichets habituels pour ce type de mascarade. »

[Note de Serge : Je trouve ce passage génial et bourré d’humour !]

 

« Les sectes ont généralement repris la tradition en vigueur dans les religions, qui veut que l’engagement total passe par le dévouement total. La vie monastique est évidemment construite sur cette base. Il faut se replonger dans la règle de saint Benoît, norme fondamentale de toute vie monastique en Occident. Tout plaisir personnel doit en être absent, et le temps, sauf l’indispensable à la survie, doit être totalement consacré à Dieu, soit par la prière (Ora et Labora) et rien, absolument rien, ne peut être possédé en propre puisqu’on a renoncé à posséder personnellement des biens. »

 

« Des Églises catholiques réalistes, comme les Églises américaines et canadiennes, ont d’ailleurs prévu des fonds spéciaux pour indemniser les victimes des prêtres pédophiles, prêtres qui seraient à 20% poussés à cette tendance. »

« La pérennité millénaire des religions n’est due qu’à cet envahissement intempestif des consciences enfantines, cette violation permanente de leur liberté par une information forcée, qui est le propre de tout conditionnement, mais donc aussi sans doute de toute éducation. »

 

« La secte, comme la communauté charismatique, le couvent, la prison, l’hôpital, la caserne, le pensionnat (et peut-être aussi certains partis ou entreprises lorsqu’il s’agit de Disney ou Mac Do) est l’une des institutions totalitaires qui prend, marque, change de nom ou immatricule, imprime dans un moule et déguise pour donner l’impression d’uniformité des corps et des esprits. Elle ôte par essence sa personnalité à l’individu, qui n’a d’intérêt et de dignité qu’en tant que membre du groupe. »

« Il n’y pas de critères utilisables pour vérifier l’existence d’une foi et nous ne sommes pas en mesure de vérifier si ce que Ron Hubbard, fondateur de la scientologie a dit (..) est vrai ou faux. Toutes les croyances sont du domaine de l’irrationnel. »

 

 

« En réalité, toute croyance vue de l’extérieur est loufoque et il est impossible d’établir une gradation entre les religions selon leur degré plus ou moins élevé de rationalité. L’irrationnel des religions qui nous sont proches nous échappe parce que nous y sommes habitués. Mais rappelez-vous qu’un concile de l’Église s’est longuement penché sur une question […] : « La vierge Marie est-elle restée vierge également pendant son accouchement ? » […]

Nous atteignons peut-être là des sommets d’irrationnel (bien que le dogme de la transsubstantiation ou transformation du pain et vin en chair et sang réels de Jésus ne soit pas mal non plus!) mais nous nous permettons de rire lorsque la méditation transcendantale nous propose de changer le monde par la matière médiatrice ».

 

« Je pense que les sectes ne sont encore en matière de « nocivité » que de pâles amateurs à côté des grandes multinationales des religions, dont les morts sont à comptabiliser par millions. »

« On sait le tumulte que créa la liste des « sectes » à la suite du rapport. Les protestations viendront surtout du milieu catholique n’admettant pas que certains de ses groupes (Œuvre, Opus Dei, Charismatiques, …) s’y retrouvent malgré les appuis officiels qu’ils ont reçus et qui devaient, en principes, les rendre intouchables. »

 

Pour toutes les diverses citations entre parenthèses :

Anne Morelli « Lettre ouverte à la secte des adversaires des sectes » (Editions Labor, 1997)

 

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